Fibromes story

Photos: Montreal Headshot (montrealheadshot.com) / Gracieuseté

Les fibromes utérins, on en parle? Dans cet épisode d’Odyans, des femmes entrent dans le (rouge) vif du sujet pour dénormaliser la souffrance gynécologique.

Transcription

«​J'avais ​tellement ​perdu ​de ​sang, ​mon ​taux ​de ​fer ​était ​tellement ​bas, ​l'anémie ​et ​tout, ​que ​j'ai ​dû ​avoir ​quatre ​transfusions ​sanguines. »

« ​J'ai ​commencé ​à ​avoir ​des ​règles ​hyper ​douloureuses, ​c'est-à-dire ​que ​c'était ​tellement ​douloureux ​que ​même ​les ​calmants ​que ​j'avais ​l'habitude ​de ​prendre, ​parce ​que ​je ​prends ​énormément ​d'ibuprofène, ​ça ​ne ​calmait ​plus ​du ​tout. »

« ​Je ​manquais ​mes ​cours. ​Mettons ​que ​j'étais ​en ​classe, ​j'allais ​dans ​les ​toilettes ​me ​cacher ​et ​pleurer ​parce ​que ​j'avais ​trop ​mal ​au ​ventre. »

« J'ai ​des ​règles ​abondantes ​depuis ​l'âge ​de ​9 ​ans. ​Je ​suis ​très ​abondante ​en ​fait. ​Mes ​menstruations ​sont ​terribles ​et ​je ​souffre ​d'anémie ​continuellement. »

« ​C'est ​malheureux. ​On ​dirait ​que ​les ​femmes, ​on ​leur ​a ​donné ​un ​titre ​de : "​Ah, ​c'est ​des ​chialeuses. ​Les ​menstruations ​douloureuses, ​c'est ​normal." »

Aujourd’hui à Odyans, on entre dans le vif d’un sujet qui touche des millions de femmes. Et quand je dis vif, je veux dire rouge vif. Yup! On va parler de flux menstruel. De serviettes sanitaires. De sang. Mais aussi de douleurs. De détresse. D’isolement. Ça sera pas une pub de produits d’hygiène féminine. Y’aura pas de fille supposément menstruée, toute souriante, en train de faire du plongeon ou de la natation. Non, dans notre cas, la fille serait plutôt angoissée de se lever de sa chaise. Ou bien pliée en deux avec des anti-inflammatoire dans la main. Aujourd’hui à Odyans, on dénormalise la souffrance gynécologique. Aujourd’hui à Odyans, on met en lumière un enjeu qu’on occulte, mais qui touche pourtant 1 femme sur 5, surtout les noires. Aujourd’hui à Odyans, on parle de fibromes utérins. Alors comme on dit : ann bay odyans.

Si vous ne savez pas c’est quoi un fibrome utérin, en voici une description simple, par Aissatou Sidibé. C’est la présidente-fondatrice de l’organisme Vivre 100 Fibromes.

« Un ​fibrome, ​c'est ​une ​masse ​musculaire ​qui ​se ​trouve ​au ​niveau ​de ​l'utérus, ​qui ​peut ​aller ​de ​la ​taille ​d'un ​petit ​poids ​à ​la ​taille ​d'un ​pamplemousse, ​et ​qui ​peut ​se ​situer ​à ​plusieurs ​niveaux : ​à ​l'intérieur ​de ​l'utérus, ​à ​l'extérieur ​de ​l'utérus ou ​dans ​le ​muscle ​utérin. ​Il ​y ​a ​des ​femmes ​qui ​ne ​vont ​pas ​avoir ​de ​symptômes ​dans ​leur ​vie, mais ​on ​estime ​que ​20 ​à ​40 ​% ​des ​femmes ​vont ​en ​avoir ​et ​ça ​va ​provoquer ​des ​impacts ​très ​handicapants ​sur ​leur ​santé. »

Des impacts, il y en a de toutes les sortes. Il y a le genre pas mal gênant…

« Je sors de chez moi, je devais apporter une 2e paire de jeans, des vêtements de rechange ou quoi que ce soit au cas où. »

… Et il y a le genre qui te pourrit carrément la vie.

« Même émotionnellement, c’était lourd. Je faisais beaucoup d’anxiété et de dépression à cause de ça. »

Celle qu’on entend, c’est Lordna. Une jeune femme qui a toujours aimé bouger, faire des activités physiques, des sorties, etc. Mais à l’adolescence, elle a commencé à souffrir de kystes ovariens et, pas longtemps après, de fibromes. Ç’a la complètement changée.

« Le moindre stress pouvait déclencher ça. Les deux, trois premiers jours de mes règles, je savais déjà que je ne pouvais pas sortir de chez moi. Au niveau de l’anémie, c’était difficile : je perdais le souffle même quand je promenais mon chien, je n’étais plus capable de faire de l’exercice longtemps, quand je faisais du vélo avec mes amis, des fois j’étais comme : "non, je ne peux pas, j’ai trop mal ou sinon j’allais shut down à chaque fois. »

Les fibromes – et de manière plus générale – les problèmes de santé gynécologique, ça peut carrément dicter comment tu vis ta vie. Parlez-en à Noire Mouliom, photographe et créatrice de contenu.

« ​Ça ​impacte ​de ​plusieurs ​manières. ​Ça ​impacte ​au ​niveau ​de ​ma ​carrière, ​ça ​peut ​impacter ​au ​niveau ​de ​ma ​vie ​de ​famille ​ou ​avec ​mes ​amis, ​mes ​relations ​d'amitié ​et ​tout, ​dans ​le ​sens ​que ​souvent, ​je ​dois ​construire ​mon ​horaire ​par ​rapport ​au ​cycle. ​Parce ​que ​j'étais ​comme, ​ok, ​si ​à ​peu ​près ​cette ​semaine-là, ​je ​pense ​que ​je ​vais ​avoir ​mes ​règles, ​on ​va ​essayer ​de ​ne ​rien ​booker ​pour ​y ​aller ​vraiment ​slow. ​Mais ​le ​truc ​avec ​les ​fibromes, ​le ​truc ​avec ​l'endométriose, ​c'est ​que ​souvent, ​on ​a ​des ​flare-ups. ​On ​ne ​sait ​pas ​quand ​s'attendre. ​Des ​fois, ​les ​règles ​sont tellement ​irrégulières. ​C'est ​une ​surprise, ​comme ​boum! ​Par exemple, tu ​prends ​l'avion, ​ça ​trigger,​tu ​te mets ​à ​saigner ​dans ​l'avion »

Avoir des fibromes, ça veut dire trouver des tactiques, rien que pour passer la journée. Ça veut dire manœuvrer comme on peut, en combinant les serviettes sanitaires et les tampons, en trimballant du linge de rechange et, quand la douleur s’en mêle, en se tournant vers les pilules. Avec tous les problèmes que ça peut entraîner. Écoutons par exemple l’expérience de Berty.

« Vers la mi ou la fin 2020, j’ai ​commencé ​à ​avoir ​des ​règles ​hyper ​douloureuses, ​c'est-à-dire ​que ​c'était ​tellement ​douloureux ​que ​même ​les ​calmants ​que ​j'avais ​l'habitude ​de ​prendre, ​parce ​que ​je ​prends ​énormément ​d'ibuprofène, ​ça ​ne ​calmait ​plus ​du ​tout. Je me suis retrouvée à prendre tellement d’ibuprofène que mon estomac était irrité. J’ai commencé à faire de l’ulcère c’était compliqué […] Je ​suis ​obligée ​de ​superposer ​les ​serviettes. ​À ​la ​limite, ​j'ai ​un ​flux ​qui ​est ​tellement ​abondant ​que ​j'utilise ​des ​serviettes ​post-partum. ​J'utilise ​des ​serviettes ​maxi ​que ​je ​suis ​obligée ​de ​changer ​tout ​le ​temps. ​J'ai ​essayé ​la ​coupe ​menstruelle, ​ça ​n'a ​pas ​marché. ​Les ​tampons, ​je ​n'en ​parle ​même ​pas. ​Bref, ​c'était ​un ​enfer. »

La majorité des femmes auxquelles on a parlé ont eu leur diagnostic à l’âge adulte. Et ça, même si elles démontraient des symptômes depuis l’adolescence, voire avant ça. Marina par exemple, a appris à 29 ans qu’elle avait des fibromes.

[…] Je ​suis ​allée ​aux ​urgences ​pour une ​douleur ​horrible ​à ​l'utérus ​et ​au ​bas ​ventre. Au final, ​c'était ​un ​kyste ​qui ​avait ​explosé, ​selon ​le ​médecin ​qui ​était ​de ​garde ​à ​l'époque. ​Et ​en ​faisant ​l'échographie, ​il ​a ​découvert ​que ​j'avais ​un ​fibrome ​de ​la ​taille ​d'une ​balle ​de ​tennis ​ou ​de ​ping-pong. ​Quand ​il ​a ​fait ​l'analyse, je n’étais ​pas ​choquée ​parce ​que ​je ​savais ​que ​ça ​devait ​m'arriver ​à ​un ​moment ​donné, mais j’ai réagi quand même avec beaucoup d’anxiété. »

Ce qu’il faut savoir, c’est que les fibromes utérins sont prévalents dans la famille de Marina. Et elle, ses menstruations sont difficiles depuis qu’elle est toute petite.

« J'ai des règles abondantes depuis l'âge de 9 ans. Je suis très abondante en fait. Mes menstruations sont terribles et je souffre d'anémie continuellement. »

Des fois, les symptômes causés par les fibromes s’aggravent tout d’un coup, plus tard dans la vie. C’était le cas pour Cynthia. Avant la trentaine, ses fibromes ne lui causaient pas trop de soucis. Mais durant un moment de sa vie particulièrement éprouvant, son état a vite dégénéré.

« ​De ​36 ​à ​38, ​avant ​l'opération, ​la ​progression ​a ​été ​rapide. ​J'ai ​été ​comme ​un ​an, ​un ​an ​et ​demi ​où, ​quand ​j'allais ​travailler, ​les ​premiers ​jours ​de ​mes ​menstruations, ​j'étais ​obligée, ​le ​midi, ​d'aller ​me ​coucher ​à ​l'infirmerie ​pour ​pouvoir ​faire ​le ​reste ​de ​ma ​journée, ​parce ​que ​j'étais ​vraiment ​les ​7 ​jours ​en ​hémorragie. ​​J'ai ​commencé ​à ​avoir ​mes ​menstruations ​le ​1er ​juin, ​je ​m'en ​rappelle, ​en ​Haïti, où j’étais pour l’enterrement de ma grand-mère. Puis, ​on est allés ​aux ​États-Unis ​pour ​l'enterrement ​de ​mon ​oncle. ​Et entretemps, ​j'ai ​attrapé ​le ​chikungunya […] ​Je ​me ​rappelle : ​du ​1er ​juin ​jusqu'à ​ce ​que ​je ​me ​fasse ​opérer ​en ​octobre, j’ai été ​​en ​hémorragie ​quatre ​mois. ​C'était ​des ​tasses ​par ​jour. J'étais ​en ​arrêt ​de ​maladie ​déjà ​à ​cause ​du ​chikungunya. ​Pis ​là, ​après ​ça, ​quand ​ils ​m'ont ​fait ​les ​tests, ​je ​leur ​ai ​dit : "ben ​là, ​ça ​fait ​trois ​semaines, ​non ​seulement ​j'ai ​le ​chikungunya, ​mais ​je ​suis ​en ​hémorragie ​depuis ​trois ​semaines, ​ça ​n’arrête ​pas». ​Là, ​ils ​m'ont ​mis ​en ​arrêt ​maladie. ​En fait, ​mon ​arrêt ​pour ​le ​décès ​de ​ma ​grand-mère ​et ​de ​mon ​oncle ​a ​juste ​continué. C'était ​pas ​évident. ​Mon ​fils, ​à ​l'époque, ​ ​avait ​peut-être ​11 ​ans. Quand ​l'épisode ​a ​passé, ​quelques ​années ​après, ​il ​m'a ​dit : "c'était ​une ​période ​où ​j'étais ​un ​peu ​déprimé ​parce ​qu'on ​était ​habitué ​en ​famille ​de ​sortir, ​de ​faire ​des ​activités. ​Pis ​là, ​tout ​d'un ​coup, ​maman, ​tout ​l'été, ​est ​couchée ​sur ​un ​sofa." ​Je ​pouvais ​juste ​rester ​couchée. »

Les effets des fibromes peuvent aussi se faire sentir quand on change ses habitudes de vie. C’était le cas pour Carolyne, lorsqu’elle a arrêté de boire.

« Quand ​j'ai ​arrêté ​de ​consommer ​de ​l'alcool, ​j'ai ​commencé ​à ​ressentir ​plein ​de ​maux, j’imagine, ​que ​je ​couvrais ​avec ​l'alcool. J'ai ​commencé ​à ​sentir ​qu'il ​y ​avait ​quelque ​chose ​dans ​mon ​estomac. ​Je ​pensais ​que ​j'avais ​des ​problèmes ​de ​digestion, donc, ​je ​suis ​allée ​consulter. ​On ​m'a ​fait ​des examens et c’est ​à ​ce ​moment qu’​on ​a ​découvert ​une ​grosse ​masse. ​Au ​début, ​on ​m'a ​juste ​dit ​ça. ​On ​a ​découvert ​une ​grosse ​masse ​qui ​est ​anormale. ​C'est ​sûr ​qu'au ​début, ​ça ​fait ​peur ​quand ​on ​dit ​que ​t'as ​une ​masse, ​puis ​qu'on ​sait ​pas ​c'est ​quoi. ​Plus tard, j'ai ​eu un ​IRM, pour ​aller ​voir ​vraiment ​en ​profondeur, ​c'était ​quoi, ​si ​c'était ​une ​masse ​cancéreuse ​ou ​si ​c'était ​un ​fibrome. ​C'est ​là ​que ​j'ai ​appris ​c'était ​quoi ​des ​fibromes. ​Et ​honnêtement, ​à ​ce ​moment-là, ​j'espérais ​que ​ce ​soit ​un ​fibrome ​et ​non ​pas, ​évidemment, ​une ​masse ​cancéreuse. ​Et ​c'était ​bel ​et ​bien ​un ​fibrome ​de ​7 ​cm ​de ​diamètre. ​Donc, ​il ​était ​assez ​gros. »

Dans le cas de Carolyne, c’est vraiment après l’accouchement que ses règles sont devenues atroces.

« Honnêtement, je n’ai jamais eu de menstruations aussi douloureuses que ça. Surtout après la grossesse, quand l’utérus a commencé à reprendre sa place après l’accouchement. Les premières menstruations ont été horribles et le sont encore. »

Parlant de grossesse… Un des problèmes avec les fibromes, c’est leur impact sur la capacité à tomber enceinte. Dépendamment d’où ils se situent dans l’utérus, ils peuvent nuire ou même bloquer tout désir de porter la vie. Ils peuvent rendre les rapports sexuels désagréables, voire douloureux. Et ils forcent aussi à faire des choix qui demandent une grosse réflexion. La présidente fondatrice de Vivre 100 fibromes, Aissatou Sidibé a passé par cette réflexion quand ces fibromes sont revenus il y a 3 ans.

« Mes fibromes sont revenus. Ça ne me posait pas de problème jusqu'au moment où j'ai pensé à concevoir. Et là, je me suis interrogée et je me suis dit ça y est, on est rendu là en fait. On est rendu là. On est rendu là parce que le fibrome utérin peut être un problème au niveau de la fertilité. Dans 1 à 2% des cas, le fibrome est responsable de l'infertilité. Statistiquement, on le sait en fonction de l'emplacement du fibrome, en fonction des chirurgies. Oui, c'est un risque aussi. Quand on se fait retirer les fibromes, on vient jouer un peu dans l'utérus. Donc, il y a des cicatrices qui se font, des adhérences. Si vous ne connaissez pas les adhérences, faites vos recherches là-dessus. C'est complexe et finalement, ça ne résout pas le problème puisque lorsqu'on veut tomber enceinte et qu'il y a des fibromes et qu'on se fait opérer, déjà, on nous dit qu'on a un laps de temps pour se faire opérer. Et ça, c'est normal. On peut attendre six à un an en attendant que l'utérus guérisse. Mais qui nous dit justement que la chirurgie qu'on a eue n'aura pas de conséquences sur notre fertilité par la suite? Et finalement, on se dit, surtout quand on essaye de tomber enceinte, on se dit, mais est-ce que c'est la chirurgie que j'ai eue il y a 3-4 ans qui pourrait être responsable aujourd'hui de problèmes ? »

À cause des fibromes, des femmes sont confrontées au choix difficile de supporter leurs souffrances ou de renoncer au désir de porter la vie. À bientôt 37 ans, Noire est rendue là et elle doit envisager plusieurs options différentes pour devenir parent.

« Étant ​donné ​qu'il ​y ​a ​quelques ​semaines, ​j'avais ​eu ​un ​gros ​flare-up, ​j'avais ​saigné ​pendant ​un ​mois ​et ​demi ​et ​j'avais ​vraiment, ​vraiment ​eu ​mal. ​C'était ​vraiment ​l'enfer ​et ​je ​suis ​présentement ​en ​questionnement ​à ​savoir ​si ​je ​vais ​me ​faire ​retirer ​l'utérus ​et ​que ​je ​trouverais ​un ​autre ​moyen ​pour ​avoir ​des ​enfants. ​Puis ​justement, ​c'est ​quelque ​chose ​que ​je ​vais ​voir ​la ​semaine ​prochaine ​avec ​mon ​gynécologue, ​que ​ça ​soit ​genre, ​peut-être ​de ​«froze ​my ​eggs» ​et ​voir ​les ​options ​qui ​s'offrent ​à ​moi. ​Puis ​comme ​genre, ​I ​don't ​know, ​mère ​porteuse ​ou ​genre ​l'adoption. J'ai ​quand ​même ​bientôt ​37 ​ans. ​J'ai ​envie ​de ​devenir ​parent, ​mais ​pour ​moi ​ce ​n'est ​pas ​une ​fatalité ​si ​je ​ne ​porte ​pas ​l'enfant. ​C'est ​• une ​réflexion ​que ​j'ai ​eue, ​ça ​fait ​plusieurs ​années, ​parce ​que ​j'ai ​déjà ​fait ​une ​fausse ​couche. ​Mais ​pour ​moi, ​être ​mère, ​ce ​n'est ​pas ​juste ​de ​porter ​un ​enfant, ​mais ​il ​y ​a ​plusieurs ​façons ​de ​devenir ​mère. ​Je ​ne ​suis ​pas ​fermée ​aux ​options ​ou ​à ​travers ​la ​technologie ​qui ​s'offre ​à ​moi, ​que ​ce ​soit ​faire ​du ​in ​vitro ​ou ​faire ​affaire ​avec ​une ​mère ​porteuse ​ou ​l'adoption. ​Je ​suis ​ouverte ​à ​tout. ​Mais ​si ​je ​tombe ​enceinte, ​c'est ​sûr ​que ​je ​serais ​heureuse. »

Vous l’avez peut-être entendu : beaucoup de femmes se font dire que c’est normal de saigner beaucoup, d’avoir mal durant les menstruations.

(Berty) « J’avais déjà des règles très, très, très douloureuses et très abondantes pendant plusieurs années et on m’avait toujours dit que c’était normal, qu’il fallait supporter. »

Cette idée-là, elle se transmet même de mère en fille, mais aussi de soignant en patiente. Elle est persistante, et on finit souvent par l’intérioriser et endurer ses souffrances pendant des années. Jusqu’au jour où on se compare à d’autres et qu’on réalise qu’on vit quelque chose de problématique. C’était le cas entre autres pour Noire.

« J'ai l'impression que si j’avais traité ça plutôt et si on m’avait prise au sérieux comme depuis même mon adolescence… Malheureusement souvent dans nos cultures, souvent nos parents nous disent ah c'est normal de souffrir. Moi ça a été mon cas. Ma mère – peut-être qu'elle n'était pas trop courante de ça, – mais elle faisait juste dire que c'est normal de souffrir, c'est normal. Mais non, ce n'était pas normal comment je souffre. Souvent, je manquais de mes cours. Admettons que j'étais en classe, j'allais dans les toilettes me cacher et pleurer parce que j'avais trop mal au ventre. Étant donné que ma mère a tellement banalisé ça, à un moment donné, ça a vraiment fait son chemin. Je suis comme, c'est normal que j'ai mal, c'est normal. Après ça, dans ma vingtaine, quand je regardais mes amis, il n'y avait personne qui souffrait comme moi. C'est là que ça a commencé. J'ai semé une graine. Je me disais que ce n'était pas normal comment je souffrais. Ça empirait. »

Souffrir de fibromes utérins, ça peut te faire te sentir différente des autres, seule au monde. Parce que oui, toi aussi t’as des menstruations, sauf que dans ton cas, ça prend toute la place et ça t’empêche de vivre. Et comme Lordna l’explique, ce n’est pas tout le monde qui a un utérus qui comprend ça.

« J’étais gênée d’en parler. Des fois, j’expliquais aux autres filles que je saigne beaucoup, quoi que ce soit et elles répondaient qu’elles aussi. Je me disais : "ok, tout le monde". Mais pas au même niveau que moi. C’était complètement différent. J’étais gênée d’aller à la salle de bain comme trois fois dans une heure. Ce n'est pas normal. Moi, je devais mettre une serviette ET un tampon. Elles étaient comme : "quoi?!" J'étais comme :"ben oui, au cas où. Elles me disaient : "bah, tu peux mettre un protège dessous." J’étais comme : "non, tu comprends pas. Tu comprends pas, ça marche pas comme ça." »

L’errance médicale est un autre effet des fibromes. Des femmes doivent souvent consulter plusieurs professionnels de la santé différents avant d’avoir un diagnostic ou un traitement viable. Ça contribue à les faire se sentir isolées et incomprises. Lordna par exemple, parle d’un vrai parcours du combattant.

« Dans le fond, j’ai eu le diagnostic après j'avais une grossesse ectopique. C'est là qu'ils ont découvert que c'était la cause. Ensuite de ça, c'est là que j'ai trouvé que le système n'était pas nécessairement là pour moi parce que ça faisait plusieurs fois que j'allais à l'hôpital par rapport à des douleurs, mais ils n'avaient jamais vraiment fait tous les diagnostics possibles pour savoir c'était quoi exactement. Ce qui fait que je l'ai su après. Je trouve que j'ai pas été suivie. C'est moi qui devais courir après le système pour pouvoir prendre des rendez-vous, demander ce qui peut être fait, si je peux avoir un scan, si je peux avoir si ou quoi que ce soit. Puis au niveau des douleurs, ils voulaient me prescrire soit des antidouleurs, mais il dit rien qu'on peut faire pour toi. »

Comme d’autres à qui on a parlé, Marina a eu l’impression qu’on minimisait le poids que ses symptômes ont sur sa vie. Et ce qui la fatigue royalement, c’est d’avoir l’impression que SA responsabilité de recevoir les bons soins.

« ​À ​l'époque, ​j'avais ​29 ​ans ​quand ​je ​l'ai ​su. ​Et ​comme ​j'ai ​dit, ​le ​médecin ​s'est ​comporté ​quand ​même ​assez ​bien, ​bien ​qu'il ​a ​banalisé ​la ​chose. ​Beaucoup ​de ​femmes ​ont ​des ​fibromes, ​ne ​vous ​inquiétez ​pas, ​etc. ​Moi, ​j'ai ​toujours ​eu ​ce ​type ​de ​banalisation, ​comme ​quoi ​vous ​n'allez ​pas ​en ​mourir, ​ne ​vous ​inquiétez ​pas. ​Mais ​la ​réalité, ​c'est ​que ​je ​sais ​à ​quel ​point ​ça ​affecte ​ma ​vie. ​Mon ​anémie ​c'est ​un ​gros ​problème ​pour ​moi, ​mes ​règles ​abondantes ​c'est ​un ​gros ​problème ​pour ​moi. ​Donc ​c'est ​toujours ​cette ​banalisation ​puis ​je ​trouve ​ça ​aussi ​très ​déplaisant ​de ​toujours ​avoir ​à ​se ​battre, ​se ​défendre, ​s'affirmer ​de ​manière ​plus ​forte ​quand ​on ​parle ​de ​fibromes ​comme ​si le ​médecin ​ne ​prendrait ​jamais ​ça ​au ​sérieux, ​donc ​c'est ​à ​toi ​de ​le ​faire, ​c'est ​à ​toi ​de ​faire ​tes ​recherches, ​c'est ​à ​toi ​de ​te ​protéger, ​etc. ​C'est ​ça ​qui ​est ​le ​plus ​difficile ​pour ​moi. »

La banalisation, elle vient aussi de plus loin que notre entourage. C’est la société au complet, qui nous renvoie l’idée qu’avoir un utérus, ben ça vient avec des douleurs, des inconforts, et faut s’y faire. Comme le dit Carolyne :

« ​ C'est ​malheureux. ​On ​dirait ​que ​les ​femmes, ​on ​leur ​a ​donné ​un ​titre ​de... ​Ah, ​c'est ​des ​chialeuses. ​Les ​menstruations ​douloureuses, ​c'est ​normal. »

Cette banalisation et ce sentiment d’être incomprise, ça crée l’impression d’être livrée à soi-même. Que notre douleur ne compte pas. Une prise de conscience publique est nécessaire, et même inévitable, d’après Aïssatou, de Vivre 100 fibromes.

« Oh, ​c'est ​rien. ​On ​n'en ​meurt ​pas. ​Oui, ​les ​femmes ​se ​plaignent. ​C'est ​normal ​d'avoir ​des ​règles. ​Donc, ​il ​y ​a ​cette ​forme ​de ​banalisation ​et ​de ​frustration ​de ​ne ​pas ​être ​écoutée ​par ​les ​bonnes ​personnes ​qui ​sont ​là ​pour ​nous ​soigner ​ou ​pour ​nous ​écouter ​tout ​simplement ​dans ​notre ​entourage. ​Et ​une ​forme ​aussi ​d'isolement. ​Où ​est-ce ​qu'on ​va ​quand ​on ​a ​justement ​un ​diagnostic ​qui ​nous ​provoque ​justement, ​qui ​nous ​pourrit ​la ​vie ​en ​fait ​? J'en ​suis ​bien ​placée ​pour ​en ​parler ​puisque ​j'ai ​vécu ​10 ​ans ​avec ​des ​fibromes, ​mais ​moi ​qui ​étais ​une ​ancienne ​athlète ​de ​haut ​niveau. ​Il ​y ​a ​eu ​des ​matins ​qui ​ont ​été ​durs, ​oui. ​Il ​faut ​continuer ​à ​en ​parler. ​Il ​n'y ​a ​pas ​assez, ​justement, ​de ​plateformes ​qui ​en ​parlent. ​Pour ​moi, ​le ​fibrome ​est ​un ​enjeu ​de ​santé ​publique. ​Quand ​on ​regarde ​les ​statistiques, ​c'est ​alarmant. ​Et ​ça, ​je ​le ​dis : ​bientôt, ​là, ​on ​fait ​la ​sensibilisation ​en ​octobre ​sur ​le ​cancer ​du ​sein. ​De ​plus ​en ​plus, ​on ​fera ​de ​la ​sensibilisation ​sur ​le ​fibrome, ​l'endométriose. ​Les ​chiffres ​parlent ​d'eux-mêmes.

C’est quoi les solutions pour les personnes atteintes de fibromes? Pour gérer les symptômes, il y a les produits de santé naturels, les infusions, les bouillotes, les sacs magiques, et tous les autres remèdes naturels. Mais il y a aussi les changements d’habitudes de vie, comme ceux que Noire a faits.

« J’avais ​déjà ​commencé ​à ​changer ​mon ​mode ​de ​vie, ​surtout ​au ​début ​de ​ma ​trentaine. ​J'ai ​compris ​qu'il ​y ​avait ​certains ​aliments ​que ​je ​devais ​couper. ​J'ai ​réduit ​énormément ​ma ​consommation ​de ​viande ​rouge. ​Je ​suis ​d’origine ​haïtienne et ​camerounaise, ​et ​on ​mange ​beaucoup ​de ​viande ​dans ​nos ​cultures. ​J’​aime ​également ​beaucoup les ​produits ​laitiers, ​les ​charcuteries. ​J'ai ​réduit ​énormément ​à ​ce ​niveau-là. ​Si ​je ​le ​fais, ​c'est  ​durant ​le ​temps ​des ​fêtes.​ On ​se ​prive ​des ​petits ​bonheurs ​de ​la ​vie! ​J’évite ​le ​gluten, ​mais ​on ​en ​trouve ​souvent ​partout. ​​C'est ​extrêmement ​difficile ​de ​faire ​attention ​ ​côté ​alimentation parce ​qu’​au ​restaurant par exemple, ​t'as ​pas ​beaucoup ​d'options. ​On ​est ​habitué ​à ​cuisiner, ​des ​pâtes, ​à ​manger ​du ​pain, ​et de ​tout ​couper ​ça ​ ​changer ​son ​mindset, c'est ​beaucoup. ​Et ​sinon, ​j'ai ​commencé ​à ​faire ​du ​yoga, ​puis ​c'est ​quelque ​chose ​qui ​m'a ​énormément ​aidée, ​surtout ​au ​niveau ​mental. ​On ​a ​la ​douleur ​physique, ​mais ​on ​a ​aussi ​la ​douleur ​mentale, ​d'être ​fatigué ​de ​combattre ​avec ​ça. »

Il y a aussi la médication. Ça peut apporter un grand soulagement, comme ça peut aussi ne pas marcher. Et ça cause des effets qui sont franchement indésirables. De toute évidence, ce n’est pas pour tout le monde. Comme le dit Aïssatou, « choisir ​entre ​la ​peste ​et ​le ​choléra, ​à ​un ​moment ​donné, ​on ​se ​dit ​non, ​quoi. »

Berty, par exemple, a essayé un traitement par injection pendant six mois, et elle trouve que le jeu en valait la chandelle.

« ​Pour ​des ​gens ​qui ​ont ​vécu ​des ​règles ​douloureuses ​pendant ​toute ​leur ​vie, ​ils ​comprendront ​quand ​je ​dis ​que ​ça ​a ​changé ​ma ​vie ​de ​ne ​pas ​avoir ​mes ​règles. ​Il ​y ​a ​eu ​un ​moment ​de ​ma ​vie ​où ​j'avais ​l'impression ​d'avoir ​mes ​règles ​tout ​le ​temps parce ​que ​j'avais ​tellement ​mal ​que ​ça ​me ​prenait ​des ​semaines ​à ​mon ​utérus ​de ​récupérer ​après ​ma ​période ​menstruelle. ​Et ​à ​peine ​que ​je ​récupérais, ​j'étais ​déjà ​dans ​le ​nouveau ​cycle ​et ​j'avais ​encore ​mes ​règles. ​Donc ​le ​fait ​de ​faire ​6 ​mois ​sans ​mes ​règles, franchement, ​c'était ​inespéré. ​Ça ​a ​complètement ​changé ​ma ​vie. ​J'avais ​une ​meilleure ​qualité ​de ​vie. ​Je ​pouvais ​passer ​du ​temps ​avec ​mes ​amis, ​avec ​ma ​famille, ​faire ​des ​plans, ​sans ​m'inquiéter ​de ​la ​douleur, ​sans ​m'inquiéter ​du ​flux […] Avec ​le ​decapeptyl, ​déjà, ​au ​niveau ​du ​fait ​de ​ne ​plus ​avoir ​mes ​règles ​aussi ​abondantes, ​c'était ​bien, ​ne ​plus ​avoir ​mes ​règles ​tout ​courts. Par ​contre, ​il ​y ​a ​beaucoup ​d’effets ​secondaires ​parce ​que ​c'est ​un ​peu ​une ​ménopause ​artificielle ​en ​fait. ​​J'avais ​beaucoup ​de ​bouffées ​de ​chaleur ​qui ​n'étaient ​pas ​intéressantes. »

Berty raconte qu’elle a même commencé à faire de l’hypertension artérielle après son traitement. Elle le dit bien : elle n’a rien trouvé qui établit un lien direct entre les deux. Et elle avait des antécédents dans sa famille avant de faire de l’hypertension. N’empêche que maintenant, elle doit suivre un traitement à vie pour ça. Mais pour elle c’est un moindre mal.

« ​​Mais ​ça ​a ​vachement ​changé ​ma ​vie. ​Le decapeptyl ​n'a ​pas ​fait ​disparaître ​mes ​fibromes, ​il ​les ​a ​calcinés, ​c'est-à-dire ​qu'aujourd'hui ​j'ai ​des ​fibromes, ​ils ​sont ​là, ​ils ​sont ​visibles ​dans ​une ​échographie, ​mais ​ils ​ne ​sont ​plus ​actifs. ​Je ​ne ​me ​suis ​toujours ​pas ​faite ​opérer, ​ma ​gynécologue ​aime ​bien ​dire ​que ​j'ai ​gagné ​un ​sursis ​de ​4-5 ​ans ​parce ​que ​la ​plupart ​de ​mes ​copines ​qui ​s'étaient ​faites ​diagnostiquer, ​presque ​au ​même ​moment ​que ​moi, ​ou ​après, ​ou ​même ​des ​gens ​de ​ma ​famille ​qui ​se ​sont ​fait ​opérer, certaines ​sont ​à ​leur ​deuxième, ​troisième, ​voire ​quatrième ​opération ​pour ​enlever ​les ​fibromes. ​Et ​moi, ​Dieu ​merci, ​je ​n'ai ​pas ​encore ​eu ​à ​passer ​par ​cette ​case-là. ​Et ​l'autre ​côté ​intéressant, ​c'est ​aussi ​que ​je ​suis ​tombée ​enceinte ​entre-temps. ​Après, ​j'ai ​juste ​décidé ​que ​ce ​n'était ​pas ​le ​bon ​moment ​pour ​moi, ​mais ​ça ​m'a ​prouvé ​aussi ​que ​je ​pouvais ​tomber ​enceinte ​naturellement ​et ​que ​je ​n'avais ​pas ​de ​problème ​à ​ce ​niveau. »

Carolyne aussi a essayé les injections et elle, ç’a été le contraire de Berty : les résultats ne l’ont pas du tout enchantée. Encore moins les effets secondaires.

« On ​m'a ​proposé ​plusieurs ​traitements. ​Je ​ne ​me ​rappelle ​pas ​de ​tous ​les ​traitements, ​mais ​c'était ​soit ​la ​pilule ​contraceptive ​pour ​aider ​à ​contrôler ​la ​grosseur ​ou, ​le ​choix ​que ​j'ai ​fait, ​qui ​était ​un ​choix ​pour ​faire ​fondre ​le ​fibrome, ​qui ​était ​le ​Lupron Depot. ​On ​m'avait ​ très ​bien avertie​  des ​symptômes ​que ​ce ​médicament-là ​pouvait ​causer. ​C'était ​des ​symptômes ​qui ​ressemblaient ​beaucoup ​à ​la ​ménopause. ​Mais ​c'était ​l'option ​qui ​avait ​le ​plus ​de ​chances ​de ​faire ​fondre ​le ​fibrome, ​donc ​j'ai ​fait Lupron Depot ​pendant ​six ​mois. ​Les ​symptômes ​sont ​horribles, ​je ​n'ai ​pas ​hâte ​à ​la ​ménopause : ​bouffée ​de ​chaleur, ​dépression, des ​traits ​noirs. ​Puis ​pour ​finalement ​six ​mois ​après, ​le ​fibrome ​n'avait ​pas ​bougé, ​il ​était ​encore ​la ​même ​grosseur, ​même ​qu'il ​avait ​pris ​je ​pense ​quelques ​millimètres. ​Donc est-ce ​que ​je ​referais ​le ​même ​choix? ​Bien ​maintenant, ​le ​sachant, ​non. ​Je ​n'ai ​pas ​tant ​posé ​de ​questions ​à ​savoir ​à ​quel ​point ​ça ​fonctionne ​sur ​les ​femmes. ​Et ​encore ​là, ​je ​suis ​consciente ​que ​chaque ​femme ​a ​un ​corps ​qui ​réagit ​différemment ​aux ​médicaments. ​Donc ​moi, ​j'étais ​de ​celle ​que ​ça ​n'a ​pas ​réagi. »

Une autre forme de traitement, c’est la myomectomie. Ça, c’est quand on se fait retirer des fibromes par chirurgie. Lordna l’a fait en juillet 2023, après qu’elle ait parlé de son désir de grossesse aux médecins. Les bienfaits ont été phénoménaux. Elle a retrouvé la Lordna d’avant et même un an après, ça l’a remue d’en parler.

« ​Après ​ma ​convalescence, ​j'ai ​commencé ​à ​m'entraîner. Je ​te ​dirais que ​la ​première ​fois ​que ​j'ai ​été ​sur ​un ​treadmill, ​que ​j'ai ​commencé ​à ​courir et que ​je ​n'étais ​pas ​essoufflée, ​j'ai ​commencé ​à ​pleurer. ​Juste ​pour ​te ​dire ​à ​quel ​point ​ça ​a ​fait ​un ​impact ​tellement ​direct. ​​Juste ​de ​tous ​les ​jours, ​être ​capable ​de ​faire ​des ​activités ​sportives, ​que ​ce ​soit ​au ​niveau ​de ​ma ​fatigue, ​ça ​m'a ​vraiment ​aidée. ​Mon ​anémie, ​mon ​hémoglobine ​a ​vraiment ​remonté. ​Je ​n’ai pas eu ​besoin ​de ​retourner ​à ​l'hôpital depuis. ​J'allais ​à ​l'hôpital ​presqu’​une ​fois ​par ​mois, ​ou ​deux ​mois pour ​faire ​des ​transfusions ​de ​fer ​à ​cause ​que ​je ​ne ​pouvais ​pas ​faire ​des ​transfusions ​de sang. ​C'était ​vraiment ​lourd. ​Depuis ​mon ​opération, ​je vois ​la ​différence. ​Mentalement, ​je suis ​moins ​anxieuse. ​J’ai ​beaucoup ​moins ​d'anxiété. N​iveau ​dépression, ​je ​pense ​que ​je ​n'avais ​plus ​aucun ​symptôme. ​Ça ​m'a ​beaucoup ​aidée ​parce ​que ​je ​sais ​que ​c'était ​directement ​en ​lien avec ​les ​fibromes. ​J'ai ​fait ​des ​consultations, ​j'ai ​trouvé ​de ​l'aide, ​mais ​il ​n'y ​a ​rien ​que ​je ​pouvais ​faire ​vu ​que ​c'est ​au ​niveau ​physique ​et ​santé. ​Maintenant, ​oui, ​je ​me ​suis ​retrouvée ​parce ​que ​je ​pense ​que ​j'ai ​tellement ​d'énergie ​en ​dedans ​de ​moi, ​puis ​je ​me ​suis ​dit, ​tu ​sais ​quoi, ​ça ​m'a ​trop ​affectée, ​je ​suis ​tannée, ​je ​ne ​veux ​pas ​que ​ça ​affecte ​qui ​je ​suis. ​J'ai ​tellement ​de ​trucs ​à ​donner, ​puis ​je ​veux ​être ​là. ​Ça ​fait ​que ​je ​me ​donne ​à ​100 ​%. »

Comme l’a dit Aissatou plus tôt, la myomectomie, c’est un pensez-y bien si on veut porter la vie, parce que c’a ses risques. Il faut en être conscient et prendre les démarches qu’il faut au préalable.

« À l'époque, quand je me suis fait opérer, je le savais qu'il y avait un risque sur ma fertilité. Je le savais. J'avais fait mes recherches en tant que fibromelle. J'avais fait mes recherches. À cette époque, j'avais 32 ans et je ne sais pas, peut-être en faisant mes recherches, j'avais fait un bilan justement de fertilité et j'avais vu à l'époque que ma réserve ovarienne, l'AMH, et ça, je le conseille à toutes, je dis bien, TOUTES les femmes en âge de procréer, qu'elles soient célibataires, en couple, dans des situations difficiles ou pas, de demander un bilan de fertilité au-delà de 30 ans. Au-delà de 30 ans même. Après 35 ans, c'est un peu tard, mais entre 30 et 35 ans, je trouve que c'est intéressant parce qu'à ce moment-là, d'ailleurs, on essaye de fonder sa famille. Et même si on ne le veut pas, ça nous permet justement de poser des actions concrètes. Et ces actions concrètes, c'est quoi ? Tout simplement de faire un état des lieux, un bilan de fertilité. On va souvent entendre ces personnes vous dire, je n'en ai pas besoin parce que, ou du médecin, vous êtes célibataire, il n'y a pas de désir d'enfant maintenant, bon, ça peut attendre. Pourquoi un bilan de fertilité ? Mais le fait de savoir qu'il y a un problème, la congélation des ovules, c'est une action concrète dont on ne parle pas. On n'en parle pas beaucoup dans la communauté, c'est quand même quelque chose de concret, parce que, le jour où on voudra concevoir, on peut utiliser nos propres ovules s'il y a un problème. Donc, à cette époque-là, je me rappelle, à 32 ans, je me suis dit, OK, est-ce que tu es prête à congeler tes ovules ou pas ? Ça m'a pris quand même de la réflexion. Et au final, j'ai fait le choix en me disant non, en mon âme et conscience. »

Pour l’instant, la seule façon d’être certain de se débarrasser définitivement des fibromes et de leurs symptômes, c’est l’hystérectomie. Ça, c’est quand on se fait retirer l’utérus au complet. C’est radical, c’est pas pour tout le monde, ça empêche de tomber enceinte, ç’a des effets franchement désagréables, mais ça débarrasse des fibromes pour de bon. Vous vous souvenez de Cynthia, celle qui a enduré 4 mois d’hémorragie, en plus du chikungunya? Eh bien, elle en a subi une hystérectomie et elle en parle comme d’une véritable délivrance. Malgré la convalescence, malgré les symptômes de ménopause. Et Cynthia est très consciente que c’est pas une solution pour tout le monde.

« Aujourd'hui, ​ça ​va. ​Je ​veux ​dire, ​ça ​fait ​10 ​ans. Ça ​a ​été ​la ​meilleure ​chose ​de ​ma ​vie, ​médicalement ​parlant, parce ​que ​ça ​m'a ​complètement ​libérée. ​Je ​veux ​dire, ​mon ​énergie ​est ​revenue, ​je n'avais ​plus ​de ​contraintes, ​plus de menstruations, c'était ​la ​joie, à ​ce ​niveau-là. ​Mais ça par ​rapport ​à ​mon ​histoire. ​Chaque ​femme ​le ​vit ​différemment. Moi, ​j'en pouvais ​plus. ​Je ne ​pouvais ​plus ​vivre ​comme ​ça. ​Je ​suis ​émotive, ​là en en parlant ​parce ​que ​c'était ​une ​période ​vraiment ​difficile. C'était ​comme, ​hey! ​Le ​plus ​vite on ​peut ​finir ​avec ​ça, ​le mieux ​c'est. ​Je ​sais ​qu'il ​y ​a ​beaucoup ​de ​femmes ​qui ​le ​vivent ​comme ​​quoi ​qu'elles ​n'ont ​plus ​leur ​utérus, ​que ​la ​féminité ​est ​affectée. ​Moi, ​j'ai ​décidé ​de ​pas définir ​ma ​féminité ​par ​rapport ​à ​un ​utérus. ​Je ​me ​suis ​dit ​que ​la ​féminité, ​il ​y ​a ​d'autres ​choses ​qui ​définissent ​ça. Pour ​moi, ​je ​l'ai ​vraiment ​pas ​vécu ​comme ​une ​perte ​de ​féminité, ​là. ​Je ​pouvais ​faire ​autre ​chose. ​Je ​pouvais ​recommencer ​à ​avoir ​une ​vie ​de ​famille ​normale.  ​Oui, ​il ​y ​a ​eu ​des ​questionnements. ​On ​ne ​décide ​pas ​de ​faire ​ça ​sans ​se ​poser ​des ​questions. ​Puis ​je ​me ​la ​suis ​posée. ​Je ​me ​suis ​dit, ​est-ce ​que ​je ​vais ​me ​sentir ​moins ​femme ​après? ​Mais ​j'avais ​déjà ​dans ​l'idée ​que ​ce ​n'est ​pas ​ce ​qui ​définissait ​une ​femme, ​donc ​ça ​m'a ​aidée. Mais ​pour ​avoir ​parlé ​à ​d'autres ​femmes ​qui ​soit ​ont ​vécu ​ça ​ou ​qui ​ne ​veulent ​pas ​subir ​cette ​opération-là ​parce ​qu'elles ​ont ​peur ​de ​ne ​pas ​se ​sentir ​femme ​après, ​je ​peux ​comprendre.»

Si vous vous reconnaissez dans le contenu de cet épisode, le mot d’ordre c’est vraiment de consulter! Et d’insister pour aller au fond des choses. Parce que comme on dit en créole, se met kò ki pou veye kò. C’est à toi de prendre ta santé en main, d’en être actrice, comme dit Vivre 100 fibromes.

Noire : « Si t’es jeune, dans l’adolescence et que tu souffres déjà, insiste tout de suite auprès du corps médical pour qu’on fasse des recherches plus poussées, plaide Noire. Tu n’es pas obligée de prendre la pilule contraceptive par exemple. D’autres options s’offrent à toi. »

Lordna : « Il ne faut vraiment pas banaliser la chose. Aucunement. Que tu aies mal au bras ou que tu aies mal à la jambe, va regarder ce que c'est. Si jamais un docteur te dit comme quoi que, dans le fond, ça va passer, on va essayer d'attendre quelques temps, tu es encore jeune ou quoi que ce soit, surtout à cause du risque qu'ils nous disent comme quoi on est jeune, Non, aucunement. Va voir une deuxième opinion, une troisième opinion s'il faut. Il y a des cliniques de fertilité, va au privé. »

Odyans est écrit, produit et réalisé par Christina Dabel et Ralph-Bonet Sanon. On tient à dire un grand merci à toutes celles qui nous ont livré leurs témoignages pour cet épisode. On remercie aussi Vivre 100 Fibromes pour tout leur soutien. Vous pouvez en savoir plus sur leurs services au V-I-V-R-E, 1-0-0, F-I-B-R-O-M-E-S, point C-A. Vous pouvez aussi les suivre sur Instagram et Facebook. Si vous aimez Odyans, commentez et évaluez l’épisode sur Spotify ou sur Apple Podcasts. Ça aide vraiment à faire connaître ce qu’on fait. Vous pouvez lire nos actualités et trouver tous nos épisodes, avec transcription, sur odyans.com. Merci de votre écoute et à très bientôt!

Suivant
Suivant

Notre enfant à nous deux